Le ridicule ne tue pas, la maladie de Charcot, si !
Personne ou presque n’avait jamais entendu parler de la maladie de Charcot avant le buzz de l’été, le déjà (trop ?) fameux Ice Bucket Challenge (IBC). Si vous avez réussi à échapper aux vidéos qui envahissent la toile depuis quelques semaines voici le principe : il consiste à se filmer en se versant un seau d’eau glacée sur la tête puis de nominer trois « amis » qui devront relever le défi et nommer trois autres personnes à leur tour…. Si vous refusez, il vous faudra théoriquement donner 100 dollars à l’association américaine ALSA, mais il est de bon ton de faire un don que l’on participe ou non.
A ce jour, l’association déclare avoir reçue plus de cent millions de dollars en un mois soit 50 fois plus que l’année dernière à la même période et se réjouit d’avoir touché 540 000 donateurs supplémentaires. En période de crise, alors que les associations galèrent pour obtenir des fonds, ce n’est pas rien !
A l’origine du buzz un athlète américain lui même touché par la maladie, quelques personnalités qui embrayent et la campagne virale est rapidement devenue mondiale.
Une multitude de vidéos sont publiées sur les réseaux sociaux, likées et partagées à foison. Tout le monde ou presque se prête au jeu puisque de Bill Gates à Lady Gaga en passant par les Simpsons ou la firme Mc Donald, la toile regorge de seaux d’eau glacée ; la France n’est pas en reste avec les défis de notre Johnny national ou de Benjamin Castaldi. Les stars ou anonymes de tout bord rivalisent d’ingéniosité et s’en donne à cœur joie pour relever le challenge.
Jusque là tout va bien : un buzz planétaire plutôt drôle, apparemment inoffensif qui rapporte des sous pour lutter contre une grave maladie, rien à dire …. Sauf que …
Si l‘un des buts est de faire connaître la maladie de Charcot au grand public, en réalité, combien d’entre vous, participant ou non, savent aujourd’hui comment elle se manifeste et ce que les malades endurent ?
Pour ceux qui ne savent pas, une petite explication s’impose : la sclérose latérale amyotrophique (SLA) ou « maladie de Charcot » est une pathologie neurologique qui touche progressivement et irrémédiablement les cellules nerveuses motrices qui commandent les muscles. Ces derniers s’affaiblissent au fur et à mesure, et la paralysie s’installe progressivement, au niveau des membres mais aussi du visage. Se déplacer, parler, manger, respirer sans assistance devient de plus en plus problématique, puis impossible. A ce jour il n’y a pas de traitement et l’espérance de vie médiane est de 3 à 5 ans à partir des premiers symptômes. Environ 6 à 7000 personnes par an sont touchées en France.
Comme souvent sur les réseaux, les nominés, connus ou inconnus, se montrent de plus en plus inventifs afin de se démarquer et on commence à assister à des dérives dangereuses. Comme ce grand père qui arrose un bébé de 10 mois ou ce jeune écossais décédé après avoir sauté d’une falaise près d’Edimbourg.
Malheureusement, si le buzz est mondial, les associations françaises qui se réjouissent de cette campagne n’ont pas vraiment profité pour l’instant de cet engouement. L’ARSLA déclare en effet, que ses dons ont été multipliés par 4 en une semaine sans annoncer de chiffres, et l’autre grande association dans l’hexagone, les papillons de Charcot qui s’occupent d’aider les malades au quotidien et moins de recherche, parlent de 200 euros … au mieux.
D’où qu’ils viennent, comment les fonds vont-ils être répartis ? On espère que cette manne providentielle va profiter aux malades (et non au président et autres salariés de l’association) et que tout cet argent récolté permettra de faire avancer la recherche rapidement. A lire sur le sujet un article posté par mon amie Kathi Apostolidis sur Facebook récemment.
Et puis, soyons franc, la période d’été est propice aux glaçons. Gageons que les réseaux vont s’appauvrir rapidement avec l’arrivée du froid et que la SLA va retomber assez vite dans les oubliettes. Mais les malades eux continueront de souffrir et de mourir dans l’anonymat et le désintérêt des foules.
Enfin, souhaitons que ce défi du seau glacé ne donne pas d’idées à des gens plus malveillants et ne fasse pas place à des challenges plus dangereux.
Et si vous n’aimez pas le froid, mais avez envie de faire avancer les choses, vous pouvez rejoindre le défi bien moins médiatique lancé pour faire connaître la maladie de Crohn. Ses malades ont aussi besoin de vous !
Et vous qu’en pensez-vous ?
Catherine Cerisey
Illustration : Merci à Guillaume de Durat
Sources :
La SLA je connais, étant dans le paramédical. Je me suis toujours dit la même chose: il suffit que quelqu’un de célèbre « attrape » quelque chose de méconnu et paf, les gens semblent découvrir la maladie. Cela a été pareil pour Alzheimer: j’ai eu l’impression que les nantis découvraient la maladie , malheureusement grâce à des personnes célèbres (notamment Petar Falk alias Columbo). pourtant, des SLA, des scléroses en plaques, des alzheimer, des parkinsonniens…. j’en soigne au quotidien. Et pas que cela. Je me dit toujours que les gens ne veulent voir que ce dont ils sont envies et le reste passe à la trappe.
Cet article me touche à bien des égard et merci à vous Catherine de l’aborder. J’ai connu un artiste chorégraphique talentueux qui est mort de la maladie de Charcot et en quelques mois, nous avons assisté impuissant à son déclin. Mais c’est quoi 6000 personnes en France sur une population de 70 millions d’habitants? Un laboratoire va t’il faire des recherches pour si peu de rentabilité?
Je suis atteinte par la rectocolite hémorragique (maladie auto-immune génétique), la version plus rare de la maladie de Crohn, puisque qu’elle ne touche que le gros intestin. Là aussi, 6 à 7000 personnes en sont atteintes en France (et 1% de la population mondiale paraît-il). À défaut on nous donne un immunodépresseur, pas toléré par tous et incompatible avec un cancer du sein! La boucle est bouclée….
Bon si avec quelques glaçons sur la tête il y avait l’espoir d’une recherche spécifique…..
Merci encore Catherine je vous lis toujours avec plaisir.
Oups les fôtes, je dois le relire avant de poster….
Moi aussi je sais ce qu’est la Sla et la maladie de Crohn. Merci pour cet article.
Merci Catherine car j’apprends ici que ce « buzz » de l’été repose sur un don à l’association ALSA !
Bonjour Catherine,
C’est Catherine 🙂
Je n’aime pas le battage et la surenchère du ALS Bucket challenge. Quand on voit certains films, on se demande même si leurs protagonistes savent pourquoi ils s’aspergent. Je voudrais le même engouement sans les fanfaronnades, sans vidéos, sans internet, mais voilà : il y a internet, les vidéos et les fanfaronnades, ce besoin de se montrer et de se mettre en scène, c’est comme ça. Si ça rapporte, si l’argent va là où il est utile et si cela permet d’éveiller la curiosité de quelques personnes au sujet de cette maladie, je suppose qu’il faut s’en accommoder ?
Je t’embrasse.
Bonjour Catherine
Je n’ai pas votre mail alors je passe par la case commentaire pour vous demander un service. J’ai fait partie il y a deux ans de l’association » au sein de sa différence ». Je cherche à joindre Cathie Malhouitre. Je suis en province et je n’arrive pas à retrouver sa trace sur internet. Je l’ai contacté par mail sans réponse. Auriez-vous l’amabilité de me donner son numéro de téléphone et de ses nouvelles, car je sais que vous la connaissez .
Merci d’avance. Cordialement.
Maryse Lallement
PS Bravo pour votre blog, sur mon chemin de guérison, il a été pour moi une mine d’informations.
Tout ce qui permet de connaître un maladie et permet de récolter de l’argent pour faire avancer la recherche, est une bonne chose….après il faut être extrêmement vigilant sur les dérives….mais nous sommes de plus en plus dans un monde de transparence qui permet de les détecter et de les combattre (même en politique ;)) cela me rend plutôt optimiste sur la suite….
Utiliser les technologies contemporaines de communication pour les bonnes causes, comme faire connaitre les maladies orphelines ou laissées pour compte, pour permettre aux assoc’ qui s’en occupent de récolter des fonds, oui, oui, oui, bien sûr!! ET si possible avec humour, mille fois oui, mille fois pour!
Mais là, moi, je suis choquée par ce gâchis d’eau pour une bonne cause, pourtant, a priori, dont notre planète et particulièrement certaines populations sub-sahariennes par exemple, manquent de plus en plus cruellement…Ne pouvait-on trouver plus « drôle » et plus « citoyen du monde »? Moins égoïste et moins inconscient?…Certains sur notre terre, douloureusement concernés par ce manque d’eau, ont d’ailleurs commencé à réagir, et non sans humour!
Merci, ceci étant, pour votre blog, Catherine, que j’ai découvert depuis peu par hasard.
Je me « retrouve » assez souvent sur ce que j’en ai déjà lu, moi qui n’ai déclaré, il y aura 8 ans dans quelques semaines, qu’un « modeste petit » cancer du sein, in situ et qui n’a nécessité « que » l’ablation de la zone tumorale et une bonne série de séances de radiothérapie. Mais j’avais déjà donné pour d’autres crabes, plus féroces, à d’autres époques, alors! – cancer du rein à l’âge de 13 ans, dans des temps préhistoriques où naissaient à peine les premiers vrais soins sur protocole, et puis, il y aura bientôt 14 ans, un fichu mélanome, à un drôle d’endroit, qui a vite métastasé mais a fini par bien vouloir s’arrêter: un quasi miracle!-
Je vais continuer à parcourir votre blog et à rire, m’émouvoir, apprendre, me souvenir aussi, au fil de vos articles et des commentaires associés. Merci encore!
Merci à tous ! je vois que le Ice Bucklet Challenge ne fait pas l’unanimité, ou du moins interroge … Quoi qu’il en soit, je ne sais pas vous, mais j’ai l’impression que depuis mon post le buzz est retombé au fin fond des oubliettes, la maladie de Charcot avec :(.
Merci pour vous informations ! Moi aussi j’ignorais ce qu’est la maladie de Charcot jusqu’à ce que j’ai lu cet article !