Les organisateurs de la conférence e-santé revoient leur copie !
Il y a deux jours, je suis tombée sur le billet de mon ami blogueur supergélule, qui publiait une interview de F. Deblock, de CCM Benchmark. Cette société organise une conférence passionnante intitulée : e-santé 2012 : mieux accompagner les patients et les professionnels de santé. Dans l’interview est abordé le sujet du patient-expert, qui, de part son expérience, acquiert une expertise qui lui permet de changer la donne dans sa relation avec son médecin.
On va donner la parole au patient expert, le e-patient, celui là même qui connaît sa pathologie, surfe sur internet, participe à des forums, écrit dans des blogs… bref celui qui peut parler d’égal à égal avec son médecin faisant fi des rapports paternalistes obsolètes appliqués jusqu’ici. Génial ! Je bois du petit lait et poursuit avidement ma lecture.
Et là, le couperet tombe : laboratoires, centres de soin, institutions, assureurs, pharmaciens et bien entendu médecins sont conviés à participer aux tables rondes mais … PAS UN PATIENT ! J’ai immédiatement mis un commentaire sur le blog de supergélule, et est attendu sagement la réponse qui ne s’est pas faite attendre. Dans une phrase laconique, il m’est dit que si si, bien sur Eurordis, fédération d’associations de malades dans le domaine des maladies rares, participera à la table ronde du jour : « le patient expert ». Mais là où le bât blesse c’est que l’intervenant de cette fédération est le Docteur Gérard N’Guyen… médecin et professeur à l’université Saint Denis !!!! Papa d’un enfant malade, il est certainement très impliqué dans le sujet et je ne remets pas en cause son intervention dans la session. Mais il a certainement et surtout aux yeux de Benchmark la légitimité du médecin sachant ! Il faut donc avoir fait ses études de médecine ou appartenir à un labo ou bien à un site internet à caractère plus ou moins commercial, pour avoir le droit à la parole !
Parallèlement une amie, Muriel Londres, co-responsable de l’antenne Ile de France de l’association Vivre sans thyroïde, interpellée elle aussi par l’absence criante de patients dans le colloque, a envoyé un courrier pour simplement être invitée comme spectatrice (colloque qui, accessoirement, coûte la modique somme de 1064,44 TTC … autant dire inabordable) ! Là aussi, malgré la promesse du site de répondre dans les 48 h, rien, nada !
Vous me connaissez, j’étais bien décidée à en faire une affaire d’état …. Tweets, discussions en off avec différents e-patients, post écrit et prêt à être publié …
Mais quelques minutes avant de mettre en ligne cet article, je reçois un mail de F. Deblock beaucoup moins condescendant que son commentaire précédent… Le voici : “J’ai mis un peu de temps à vous répondre sur Supergélule mais mon commentaire ne passait pas sous Firefox et Chrome. J’ai dû utiliser Internet Explorer pour qu’il soit pris en compte…Comme je le disais, Eurordis sera représentée. Mais si vous souhaitez venir à la conférence, je vous invite avec plaisir. La table ronde étant pleine, je ne peux pas vous faire intervenir mais vous pourrez réagir lors des questions / réponses.Qu’en dites-vous ? Cordialement”… Sauvé par le gong !
Ils ont donc revu leur copie et m’invitent « cordialement » comme spectatrice des tables-ronde. Mieux que rien je dirais …
Il est malheureusement nécessaire de crier, pour ne pas dire hurler, pour faire entendre notre voix. Pourtant nous sommes parfaitement légitimes dans ces débats et le véritable enjeu de la santé 2.0 aujourd’hui est d’inclure TOUS ses acteurs : médecins, professionnels, industriels et nous, les patients…
Je tiens à préciser qu’il existe des gens qui ont compris le tournant qu’a pris la santé 2.0 et la place essentielle du patient dans les discussions ; entre autre, et surtout, Denise Silber qui organise LE colloque e-santé chaque année à Paris (Doctors 2.0 & you), et y invite des patients. Je la remercie en passant !
Il n’est plus possible de bâillonner les malades ; l’avenir c’est justement nous donner la parole pour que tous ensemble, nous tendions vers un même but : améliorer la prise en charge et la qualité des soins auxquelles nous pouvons tous prétendre! L’ère internet a changé la donne et c’est avec nous que la santé 2.0 évoluera dans le bon sens parce que finalement, nous sommes tous concernés. Nous sommes tous des patients potentiels, n’est-il pas?
DERNIERE MINUTE : je viens d’avoir l’organisateur de la conférence qui, finalement, m’invite à participer à la table ronde « le patient-expert » ainsi celui-ci sera représenté dans les débats qui je suis sure seront passionnants ! La suite sur le blog sans doute :).
Bonjour Catherine,
bravo pour votre détermination, et surtout pour avoir obtenue de pouvoir assister grâcieusement à cette conférence.
Etant patient-expert également, j’ai tenté ma chance il y a 2-3 jours, mais ai reçu une réponse négative.
J’espère que vous pourrez représenter notre communauté de patient-expert ou de e-patient, lors de cette matinée, qui, encore une fois, est conçu pour parler de nous, en nous oubliant ! Un comble !
Cela me fait penser à ces hospitalisations, où nous sommes sur notre lit d’hôpital. Et arrive le troupeau de blouses blanches, comme j’aime les appeler, qui se mette à parler de nous, à la 3ème personne, comme si nous n’étions pas là. Ce n’est pas normal !
Alors merci !!
Je continue la visite de votre site que je ne connaissais pas.
Bonne journée.
Christelle Durance
patient-expert
(et fondatrice d’une toute nouvelle société : e-PEx http://e-pex.fr)
Bonjour Catherine, Bonjour Christelle.
Merci Catherine pour ce texte, j’espère que ta présence à la conférence ne sera pas simplement en tant qu’ auditrice 🙂 J’espère que ce que tu as à dire en tant que e-patiente sera entendu.
Voici pour ma part une lettre ouverte que j’ai adressé aux organisateurs : http://seenthis.net/messages/51544.
Bonne lecture !
Tu as bien fait comme toujours, Catherine; et tu vois, moi qui ne connais rien à rien, qui n’ai jamais entendu parler de cancer en treize années d’accompagnement; moi qui suis docteur d’état, et donc ignorante, comme il se doit, je vis sans thyroïde depuis . Précancéreuse, qu’elle était, Tchernobyl était passé par chez nous au fin fond de notre province dans l’est de la France.Crois-tu sincèrement que si j’avais demandé à participer, puisque je vais sur médical pro TV régulièrement, crois-tu donc qu’ils m’auraient invitée, moi qui vis depuis sans thyroïde…une littéraire en plus! C’est rédhibitoire, tu le sais bien.
Ce n’est pas passé, depuis 1993 où on m’a ôté la thyroïde, même qu’elle était pas belle dixit le chir.
Super, tu as réussi à te faire entendre !
Par contre, quand tu dis que nous sommes celui qui peut parler d’égal à égal avec son médecin, là, je ne le crois pas. Nous sommes est resterons avec notre statut de patients et eux resterons ceux qui savent, quoique nous ayions comme bagage ‘scientifique’. Nous sommes de l’autre côté de la barrière. DSS en parle très bien, lui qui a changé de côté. Il n’empêche que notre parole commence à se faire entendre, et il n’est pas certain que les toubibs ne s’y retrouvent pas eux aussi.
des bises de Méli
bonjour Catherine,
c’est curieux comme je me sens souvent dans un monde à part, mais un lieu particulièrement soigneux pour moi.
un centre où les patients sont toujours bien accueillis, écoutés, aidés…
un centre où l’on m’avait installée, sans même mon avis, mais vue l’urgence, je pense que mon CHD avait bien choisi pour moi. 20 ans qu’ils sont à mes petits soins.
MERCI à toi, centre Gauducheau, à Nantes.
Oui, j’aime aussi rassurer les patients, on peut être des gens precieux où l’on est connus, reconnus et toujours accueillis avec sourire.
bises à tous
et à toi en particulier Catherine 😉
(je suis peut etre hors sujet, mais voilà ce que ça m’a mis en tête à te lire. c’est sans doute le bien reçu ce matin malgré la chimio…)bisou !
bravo Cath ! si c’est pas du flag, ça y ressemble 🙂
La santé 2.0 est l’avenir de la relation médecin-patient, il est symptomatique de constater qu’une telle boulette (l’absence de tout représentant patient) n’a même pas sautée au yeux des organisateurs ou des intervenants. Étrange aveuglement. Qui en dit long en fait, les silences sont parfois éloquents.
merci Catherine
Il y a du chemin a faire pour nous faire entendre. Il y a malgré tout des centres de soin qui écoutent le patient et sa moitié, a condition de ne pas les inonder de questions.
Il faut beaucoup de tact pour se faire entendre en tant qu’expert sans froisser les susceptibilités.
Mais je dois dire que ces dernières semaines, le service d’oncologie médicale du CH de Senlis ont été à l’écoute pour la pneumopathie aigüe de mon épouse avant sa sixième chimio, et je veux les remercier pour cela.
Le patient expert ou le proche-patient expert doit rester calme, attentif à leurs charge de travail mais déterminé pour faire passer le message….
Et un sourire en entraine d’autres, c’est la meilleure façon de se rencontrer
Bonjour à tous et bienvenue Christelle,
Du nouveau sous le soleil : l’organisateur m’a demandé de lui téléphoner pour parler de ma présence à la conférence… A suivre donc 🙂
Je vous embrasse et merci pour vos commentaires
Catherine
Très intéressant, bravo, et j’espère suivre votre expérience. Je suis médecin, très orienté « nouvelles technologies », et par ailleurs promoteur dans ma démarche de soins d’une attitude « moderne » où le médecin est « conseiller » d’un patient acteur de sa santé, plutôt que donneur d’ordre d’un patient soumis (à vrai dire, même le mot « patient » pose un peu problème de par son étymologie, mais on manque d’alternative).
Néanmoins, il y a un écueil à surtout ne pas perdre de vue : certaines personnes ont, pour de mauvaises raisons, envie « d’avoir raison » face à l’expert de la santé qui est en face d’eux. Il faudrait trouver un mode de fonctionnement qui permette que le médecin à la fois soit à l’écoute de l’avis de son « patient-expert » mais ne soit pas en devoir de se « justifier » de chacune de ses décisions (j’espère que chaque lecteur comprend bien la différence entre « discuter » et « se justifier »). C’est une question de respect de la personne/médecin par la personne/patient, et ça c’est quelque chose qui ne peut pas se légiférer …
Bonjour Docteur et bienvenue sur ce blog,
Je suis ravie d’accueillir un médecin ici et qui plus est, un médecin 2.0. Je suis entièrement d’accord avec vous, il n’est pas question de remettre en cause un avis médical ou une décision de protocole qui découlent de connaissances scientifiques qu’aucun patient expert ne peut prétendre avoir. Le médecin reste le seul à pouvoir décider des meilleurs traitements qu’il choisit pour son patient.
Cette connaissance acquise sur le net, doit permettre au e-patient d’engager une discussion avec son médecin, de comprendre ses choix et décisions et de suivre ses recommandations en les intégrant d’autant mieux qu’il sait pourquoi et comment ils sont faits. En aucun cas lui demander de se justifier à tout bout de champs. La nuance est effectivement d’importance.
D’autre part, tout patient 2.0 ne peut être considéré comme patient expert. Le net foisonne de sites farfelus, distillant des informations fausses ou obsolètes qui peuvent aiguiller vers des idees fausses voire meme parfois dangereuses Le e-patient, en revanche, connait sa maladie, suffisamment pour discuter avec son médecin libérés tous deux de cette relation paternaliste qui engendrait jusque la un rapport inégal.
Si je donne des conseils ici, je rappelle inlassablement qu’il faut TOUJOURS, demander l’avis de son médecin avant de prendre une décision pour sa santé. Enfin, je pense que les choses avanceront quand d’une part, les malades sauront se servir d’Internet et identifier les sites sérieux et quand d’autre part, les médecins si frileux face à la nébuleuse toile, viendront nous y rejoindre pour prolonger les échanges et ainsi fiabiliser les informations.
Merci infiniment pour votre commentaire qui nous éclaire sur la vision d’un médecin 2.0.
À très vite, j’espère
Catherine
Bonjour,
Je soutiens entierement l’idée du site, et de Catherine, dans le sens ou n’étant pas forcement d’égal à égal, il ne peut être que salutaire pour un patient de savoir, durant une consultation, ou le suivi d’une pathologie, de quoi il en retourne.
En effet dans tout cheminement thérapeutique, une part « active » du patient ne sera jamais de trop, si une alliance peut être favorisée entre le medecin et son patient via la connaissance, tant mieux, c’est ce qu’on appelle d’ailleurs l’alliance thérapeutique.
Je pense que les patients experts auront assez de recul pour concevoir la différence de statu demeurant cependant avec le medecin.
Bon courage a tous
Merci,
je pense qu’effectivement les patients experts sont tout à fait capables de faire la différence entre leurs connaissances acquises sur le tas, et les nombreuses années d’études scientifiques des médecins :).
Je suis tout à fait d’accord avec votre point de vue sur l’alliance thérapeutique qui est nécessaire et malheureusement pas encore systématique. Pourtant le patient doit être au coeur de sa santé …
Qui dit alliance dit aussi prises de décisions communes, puisque finalement c’est bien le patient qui décide en dernier lieu. Mais il ne peut le faire qu’avec une vision objective de toutes les données, si tant est que lui aussi donne toutes les indications nécessaires au praticien pour le soigner. Il faut donc une confiance réciproque entre les deux parties gage d’une bonne prise en charge.
merci encore pour votre commentaire
Bien à vous
Catherine